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Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné | Narcisse E. Céphise Messages : 280 Points : 5277 Date d'inscription : 03/05/2014
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| Sujet: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Sam 28 Juin - 16:32 | |
Jeu silencieux
jeu dangereux
« Un lac réfléchit mieux les étoiles qu'une rivière. » Théodore Jouffroy Narcisse, c'est l'histoire d'une fascination. Fascination de soi, fascination d'une éternité. Quel paradoxe, quelle ironie, que les derniers instants terrestres de cette fatale destinée, revêtent un caractère à la fois si terrifiant et si fascinant ? Narcisse se souvenait de ces minutes que tout mortel attend avec réticence et appréhension, à savoir sa propre mort. Il ne pouvait pas y repenser sans frémir au souvenir de ces longues heures de désespoir stérile, puis de la chute et du contact glacial de l'eau du lac. Tout cela avait suscité chez Narcisse une impossibilité de contempler une grande surface d'eau, sans, par association d'idées, repenser au long étouffement qui était venu à bout de l'adoration qu'il vouait à son reflet, il y avait de longues années de cela, au bord d'un étang froid. Et pourtant. Les deux extrémités contraires d'une parallèle finissent toujours par se rejoindre, et il n'est pas rare que terreur et effroi, riment avec fascination, morbide ou pas. La première fois que l'apparent jeune homme avait aperçu, à plusieurs mètres de l'endroit où il se trouvait, la surface des eaux du Styx se jetant dans une large étendue d'eau immobile qu'il serait plus honnête d'appeler "marais" que d'honorer du nom de "lac", le premier geste réflexe qu'il avait eu, avait été un vif mouvement de recul alors qu'il se trouvait, pour la première fois depuis sa descente aux Enfers, assailli par le souvenir de sa mort. Il s'était alors empressé de fuir ce lieu maudit qui lui montrait ce qu'il ne voulait pas voir. Et pourtant. Durant les semaines qui suivirent, l'image des marais ne cessèrent de revenir en mémoire à l'illustre Orgueilleux, qui ne put bientôt plus s'en détacher. Il craignait cette vision nocturne qu'il avait des ces eaux dormantes. Mais il fallait bien l'avouer : elles le fascinaient, et semblaient l'appeler à elles, le sommer de revenir s'y perdre. Narcisse n'avait pu résister à cet étrange appel. Et pourtant. Pour la deuxième fois, il avait fui. Mais il l'avait fait pour une raison tout autre, non par effroi face à son passé et face à lui-même, mais par peur... d'autre chose. Autre chose, qui remuait sous la surface sombre du lac embrumé. Autre chose, figure étrange et vraisemblablement peu humaine, dont il avait bien plus tard appris la véritable identité. Depuis, un étrange jeu de cache-cache, d'attirance-répulsion, s'était mis en place entre les deux êtres. Lui revenait, et franchissait à chaque fois un pas de plus qui le rapprochait d'Elle. Et Elle... qui sait ce qu'Elle tramait du fond de ces eaux froides. Rien de bon, probablement. Mais peu importait. Quelque chose le poussait à avancer de plus en plus. Jusqu'au point de non retour... Narcisse ne pouvait plus supporter l'atmosphère qui régnait ces derniers temps en ville. Sortir lui donnait des vertiges, tant il trouvait détestable le pouvoir donné par la mixture contenue dans le Saint Graal offert par son Renzo - quelle canaille que ce Lorenzaccio ! -. Voir à travers les vêtements. N'importe qui aurait trouvé cela amusant et en aurait tiré parti pour se moquer de ses semblables. Narcisse, quant à lui, déplorait simplement le répugnant spectacle qui s'offrait à ces yeux dès qu'il sortait de ses appartements. Il avait donc choisi de s'isoler en attendant que cela passe. Même la cathédrale était surpeuplée en cette chaude journée qui poussait les damnés à venir y trouver de la fraicheur. Où d'autre pouvait-il aller pour échapper à cet étouffement croissant, que près du marais, où il pouvait se réfugier en lui-même et plonger dans les entrailles de son passé, comme il l'aurait fait dans l'étang glacé ? L'Orgueilleux s'enfonça dans les bois sombres entourant les eaux du Styx. Les arbres y formaient des silhouettes surréalistes, jetant au sol des ombres semblant tout droit sorties d'un tableau expressionniste. Narcisse était de ces rares personnalités qui aiment à la fois les lieux où "tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté", et les bas fonds sombres et morbides. Du fond des bois résonnaient des sons peu communs, entre cris et chants, entre menaces et appels languissants. Comme à chaque fois, Narcisse se laisser bercer par cette mélodie funéraire et regardait avec fascination le délicieux effroi qu'elle suscitait en lui. Il avançait d'un pas mesuré, savourant chaque instant ainsi passé en lui-même, absorbé. Jusqu'à ce que la pente, s'accentuant, le force à s'arrêter. L'éphèbe eut presque un sursaut. Ainsi concentré sur sa marche et sur son émotion présente, il avait failli effleurer la surface sombre des eaux encore calmes. Il n'était encore jamais allé aussi loin. Il n'était jamais venu aussi près. Ce que cela signifiait, il n'aurait jamais voulu le comprendre. Et pourtant. Il avait brisé l'accord tacite qui avait régné pendant toutes ces années, entre Elle et Lui. Il avait franchi le point de non-retour.
Dernière édition par Narcisse E. Céphise le Jeu 16 Oct - 20:24, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Dim 29 Juin - 15:13 | |
Un coeur palpite dans les tréfonds du lac maudit Endormie, la bête préfère rester lovée sur elle-même. Semblable à un embryon de cette chère mère Lac, l'animal reste tapi au creux de sa grotte profonde et sombre. Aucun poisson ne vit dans ces eaux, aucune algue n'y pousse, tout n'est qu'eau et sable noir, silence inquiétant et beauté ténébreuse. On raconte tant de choses sur ce lac, certains disent qu'il s'y cacheraient des sirènes à l'apparence fantomatique se plaisant à murmurer de douces complaintes pour attirer les âmes en manque d'amour et les garder ainsi prisonnières du marais. D'autres racontent que le lac lui-même serait vivant au même titre que les arbres morts qui l'entourent, que le marais aurait sa propre volonté et ses propres désirs. Les âmes d'ici bas relatent beaucoup d'histoires et de légendes mais il y a une bête dont on murmure le nom avec effrois aux détours de ruelles sombres. Elle n'est que fureur et horreur, bon nombres d'âmes présents en enfers s'y retrouvent à cause d'elle et sont encore terrifiés à l'idée de croiser son chemin une nouvelle fois. Elle a tellement de noms, mais celui que l'enfer décida de garder est Nessie, bien que les âmes des marins de jadis l'appellent Léviathan. Où est la bête ? Que veut-elle réellement ? Sa fureur explosera-t-elle à nouveau dans un torrent de frustration et de souffrance ? On ne peut y répondre réellement. Sa souffrance n'est connue que d'elle seule, une peine bien réelle qu'elle ne sait exprimer autrement que par la colère qui brûle ses entrailles. Pauvre bête. Elle semble si paisible endormie au fond de son lac, son souffle apaisé formant des bulles qui remontent lentement jusqu'à la surface. Mais est-elle réellement endormie ? Ou cherche-t-elle juste un moment de paix, un moment sans la moindre pensée funeste afin de reposer enfin son cœur, son esprit, son âme. Apaiser ce noyau brûlant d'amertume qui ne cesse de déchirer ses entrailles. Les monstres eux aussi ont besoin de paix. Mais ce calme n'est que de courte durée, quelque chose se rapproche de son antre, de son domaine. Il avance, comme guidé et non d'un pas assuré. Il se rapproche, encore et encore jusqu'à ce que par accident, il frôle l'eau glacée du lac. De légères vibrations, à peine perceptibles se mettent alors à arpenter toute la surface calme et lisse du lac, glissant à l'intérieur des abysses pour venir onduler contre le museau de la bête. Son œil s'ouvre, elle se réveille. Qui donc a osé réveiller le monstre de son sommeil paisible ? Qui s'est permis un tel affront ? On ne dérange pas Nessie, on n'aborde pas Nessie. Levant son cou vers la surface, elle se met à onduler longuement, restant encore cachée par la noirceur des eaux, elle se rapproche, tel le serpent, invisible, sournoise et observatrice. Quel est donc cet être ? Ce visage, il lui est si familier. Elle le connaît, ces traits parfaits, ce visage d'ange à la beauté ensorcelante, cette cascade d'or qui s'écoule sur ses épaules pourtant frêles. Narcisse. Ce prénom à lui seul suffit à crisper la mâchoire de la bête. Elle ne l'aime pas, ce sale orgueilleux, cet amoureux de lui-même, cette poupée de cire à l'égo bien trop grand pour pouvoir être décrit. Il l'exècre, comment ose-t-il s'aimer autant alors qu'elle hait tant son propre corps ?! Ce n'est qu'un naïf, un imbécile qui aime les miroirs. N'avaient-ils pas discuté ? La limite. Il l'avait dépassée, de loin. Comment ose-t-il se tenir ainsi sans gêne près de Son Lac, à la porte de Son domaine, à l'entrée de Son territoire ? L'agacement se mit lui aussi à pointer le bout de son museau dans l'esprit de la bête aussi décida-t-elle de rappeler à Narcisse, qu'elle n'était pas n'importe quel animal. Usant de son pouvoir de contrôle des eaux, elle fit alors jaillir une immense représentation de son apparence de monstre, faite entièrement en eau, qui hurla à pleins poumons en déployant son cou immense. La bête d'eau se brisa alors net pour retomber dans une pluie violente, droit sur le jeune homme bien trop près de l'eau au goût de Nessie. Lentement, la bête originelle reprit son apparence de petite fille de douze ans et se mit à émerger de l'eau avec grâce pour s'arrêter à sa surface, marchant sur l'eau. Elle le toisa de ses grands yeux bleus cernés de noir et durcit son regard lorsqu'elle se rend compte que sa beauté n'a pas flétri. Curieusement, une petite voix en elle espère toujours qu'au fil des siècles, Narcisse perdra de son éclat pour ne ressembler qu'à un homme comme un autre. Mais rien ne change ici en enfer, pas même les cœurs des créatures qui y sont tapies. Un soupire passe ses lèvres alors qu'elle glisse une main dans sa chevelure étonnamment sèche, laissant enfin sa voix enfantine, sa voix délicate et cristalline, se faire entendre : "Que fais-tu si près, l'amoureux des miroirs ?! Je t'ai interdit ce lac. Voudrais-tu t'y noyer une deuxième fois ? Tu m'agaces parce que tu es là. Retourne embrasser ton reflet ailleurs."
Nessie n'est guère connue pour son hospitalité néanmoins, il es toujours surprenant de constater que malgré son âge très avancé, elle possède la voix douce d'une enfant ainsi que les termes. Prisonnière de ce corps, elle est incapable de formuler ses phrases dans un langage soutenu et parlera toujours avec simplicité bien qu'élégance par moment. "Narcisse, tu sais que les gens qui se baignent ici deviennent mes poupées. Tu en serais la plus belle mais quand je vois ton joli visage, je n'ai envie que de t'arracher la tête et te couper les cheveux. Va-t-en maintenant."Et oui Narcisse, les petites filles ne sont pas très soigneuses avec leur poupée alors prends garde à ne pas y perdre une mèche. |
| | | Narcisse E. Céphise Messages : 280 Points : 5277 Date d'inscription : 03/05/2014
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Dim 29 Juin - 17:11 | |
Jeu silencieux
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Ce fut le contact de l'eau sombre qui sortit Narcisse de ses rêveries de promeneur solitaire. Il ne sentait plus le sol sous son pied. L'Orgueilleux eut un léger sursaut, dans une fugace perte de cette contenance qu'il avait appris à garder dans n'importe quelle situation et qui état le gage de l'autorité qu'il conservait sur ses adeptes. S'il perdait, ne serait-ce qu'une seconde, son expression impassible devant ses fidèles, alors cet ascendant qu'il avait pris sur eux n'était plus assuré. Cela avait déjà failli arriver la veille, lors de cette étrange rencontre dans la cathédrale, ou une jeune femme du quartier 0 l'avait surpris dans son extase poétique nocturne. Il avait cependant repris le contrôle de la situation. Le Gourou ne pouvait se permettre aucun écart, ne serait-ce que devant ses plus proches servants. Surtout devant eux. La seule personne qui pouvait se vanter de Le connaître pour ce qu'Il était, c'était sa pupille... Lorenzo. Et encore.
Le contact de l'eau la lui avait fait perdre, cette impassibilité de marbre, pendant quelques secondes. Narcisse avait écarquillé des yeux, suivant du regard l'onde nacrée qui partait du rivage pour aller vers le centre du lac, mouvement aquatique qu'il avait lui-même provoqué. Ses muscles se raidirent dans une attente crispée. Qu'allait-il se passer ?
Peut être ce léger mouvement n'allait-il pas être perçu. Peut être allait-il simplement faire volte face et s'en retourner dans ses quartiers. Ni vu, ni connu. Narcisse ne pouvait s'empêcher d'entretenir cet espoir, tout en sachant qu'il était vain. Narcisse s'aimait trop lui-même pour estimer autrui ; cependant, il n'était pas assez aveuglé par son propre éclat pour sous-estimer la fureur de celle que l'on nommait Nessie...
L'Orgueilleux, en cette seconde, était traversé par une vague de sentiments contradictoires. Le vain espoir que rien ne se passerait. La crainte, l'effroi de ce qui allait suivre. Mais toujours... cette fascination. Le vertige n'est pas seulement la crainte du vide. Le vertige est une fascination. Le vertige est une sourde envie de tomber, modérée par notre bon sens et notre principe de réalité... C'était cette envie de tomber qui s'emparait inconsciemment de Narcisse en cet instant, prenant peu à peu possession de ces sens. L'éphèbe s'était immobilisé. Il attendait.
Il n'eut pas à attendre longtemps. Une onde d'une plus grande violence parcourut l'eau silencieusement. Tout était encore trop calme.
Soudainement, ce calme fut violemment brisé. L'onde qui avait parcouru le lac gonfla avec un bruit de cascade, jusqu'à former une forme monstrueuse, sorte d'hybride aquatique dressant sa silhouette menaçante au dessus des cimes. La forme le surplomba pendant les quelques secondes où Narcisse la contempla, immobile ; puis elle sembla imploser et déferla en une pluie d'une rare violence lancée en direction de l'Orgueilleux.
Une fois encore, ce fut le contact de l'eau qui tira Narcisse de son immobilité, mais d'une manière bien différente de la première fois. La pluie envoyée par la créature était moins une simple pluie, qu'un torrent qui le projeta quelques pas en arrière. Il leva les bras pour se protéger de la violence des jets d'eau, et tomba en arrière sans main pour retenir sa chute. En un seul mouvement, l'Orgueilleux des orgueilleux avait été mis à terre... par une apparente petite fille de douze ans. Quelle ironie...
Ladite petite fille se matérialisa à plusieurs mètres de là, au milieu de la surface sombre du lac. Elle daignait enfin se montrer sous sa véritable apparence. La véritable confrontation pouvait enfin commencer. La satisfaction de la transgression était doublée par l'orgueil blessé de Narcisse que l'eau avait jeté à terre. Il se releva et lui fit face, alors que sa voix monta, claire et cristalline, jusqu'au rivage où il se tenait.
"Que fais-tu si près, l'amoureux des miroirs ?! Je t'ai interdit ce lac. Voudrais-tu t'y noyer une deuxième fois ? Tu m'agaces parce que tu es là. Retourne embrasser ton reflet ailleurs."
"Voudrais-tu t'y noyer une deuxième fois." Elle avait visé le point sensible. Nessie savait toucher là où ça faisait mal... Que répondre à cela ?
"Narcisse, tu sais que les gens qui se baignent ici deviennent mes poupées. Tu en serais la plus belle mais quand je vois ton joli visage, je n'ai envie que de t'arracher la tête et te couper les cheveux. Va-t-en maintenant."
Cette enfant possédait un charge étrange, avec cette simplicité de langage, ce doux apitoiement doublé d'une sèche intransigeance. Ils avaient quelque chose en commun. Plus qu'à trouver quoi.
- Nessie, commença-t-il reprenant le début de sa phrase, tâchant de garder une voix posée. Tu sais que je ne viens pas ici pour t'importuner. Je n'ai franchi les limites tacitement accordée ni par malice, ni par facétie.
Mais par provocation, peut être en partie. Il ne pouvait le nier. Il poursuivit, tâchant de sembler sûr de ses paroles :
- Je sais que la solitude est infiniment bénéfique, et qu'il n'y a rien de plus agréable que d'être seul avec Soi. Mais puisque tu semble disposée à admettre que ma présence rehausse la beauté de ces lieux, pourquoi ne l'acceptes tu pas ?
Il marqua un temps et repris avec plus d'assurance, d'un ton plus appuyé, en soignant ses mots :
- Qu'est ce qui te pousse, Nessie, à chercher au fond de ces marais la négation de ton humanité même ? Quel mal t'empêche de croître, et te force à rester dans une agressivité stérile ?
Une sorte d'inspiration lyrique avait fini par prendre le dessus, doublée d'une volonté de ne rien lui céder. Si elle avait cru qu'il se contenterait de s'excuser et de ne jamais revenir, c'est qu'elle ne le connaissait pas aussi bien qu'elle voulait le montrer. |
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Dim 6 Juil - 18:56 | |
Coquillage aux couleurs criardes, échoué sur une plage d'amertume -Nessie, tu sais que je ne viens pas ici pour t'importuner. Je n'ai franchi les limites tacitement accordées ni par malice ni par facétie.Elle le toise, froide et terrifiante, petite demoiselle dont le corps frêle ne sert qu'à masquer une puissance affolante. Ni par malice, ni par facétie dit-il dans ce cas, une seule raison apparaît clairement dans l'esprit de la bête, un désire de provocation à peine dissimulé. Si tel n'était pas le cas, pourquoi oserait-il se présenter ainsi face à elle ? Sa mâchoire se crispe sous cette constatation, son visage commençant à être déformé par la moue d'une enfant vexée, l'expression d'une fillette à qui l'on interdit de jouer et de rire pleinement parce qu'un invité s'est présenté et qu'il faut donc, bien se comporter. Mais cet invité, n'est rien d'autre qu'un intrus. Une pierre blanche qui s'est laissée roulée sur la plage noire comme le cœur de la reine des lieux. Qu'il s'en aille. Qu'il parte. Nessie est en colère contre son père et contre la moindre personne qui lui rappellerait son géniteur. Et cet air, cet beauté, ce regard qui se veut doux alors qu'il n'est que tromperie et ruse. -Je sais que la solitude est infiniment bénéfique, et qu'il n'y a rien de plus agréable que d'être seul avec Soi. Mais puisque tu sembles disposée à admettre que ma présence rehausse la beauté de ces lieux, pourquoi ne l'acceptes-tu pas ?De quel droit se permet-il de presque affirmer qu'il possède sa place en ces lieux ? La colère pointe le bout de son museau pointu, une nouvelle fois, s'insinuant dans son cœur et son esprit, chauffant ses muscles et les jointures de ses doigts. Qui est-il pour décider s'il peut lui tenir compagnie ? Sous prétexte que sa beauté et reconnue de tous ? -Qu'est-ce qui te pousse, Nessie, à chercher au fond de ces marais la négation de ton humanité même ? Quel mal t'empêche de croître, et te force à rester dans une agressivité stérile ?
Là, ce fut le coup de grâce, l'affront de trop, les mots qu'il valait mieux ne pas émettre. Nessie n'est pas humaine et ne le sera jamais, hors de question d'être comparée ne serait-ce que légèrement à cette race d'êtres rachitiques et sans valeur. A ces faibles que l'on peut si aisément briser. Ils n'étaient que pantins de porcelaine à ses yeux de jadis, cette punition qu'elle subit, elle ne peut l'accepter car cela serait renoncer et donner raison à son père. Narcisse, pauvre être que tu es, ta langue n'aurait pas dû tant déraper. D'un geste sec, elle écarta ses doigts comme si elle tenait une boule invisible et très vite, l'eau du lac forma une prison sphérique autour du corps de Narcisse, l'emprisonnant de la tête jusqu'au cou. D'une légère ondulation de la main, elle fit se rapprocher la boule d'eau de son être, son visage à présent à une trentaine de centimètre. -Les gens superficiels n'ont pas leur place ici Narcisse. Tu entres chez moi sans me demander quoi que ce soit et maintenant tu te mets à parler de papa de façon détournée. Tous, connaissent ma fureur et pourtant, l'amoureux des miroirs ose me titiller. Grosse bêtise et les enfants pas sages, on les puni.Aussi, à peine eut-elle terminé sa phrase, qu'à nouveau, sa maîtrise de l'eau fut usitée. La sphère aqueuse s'étira alors subitement afin de recouvrir également le visage du jeune homme. Le voici entièrement englouti par le globe de liquide, flottant dans les airs sous le regard hautain de Nessie. Dans son infinie cruauté et colère, la bête des eaux choisit d'offrir une seconde noyade au pauvre Narcisse, se délectant de ce spectacle atroce. Elle ressent sa peur, la faisant vibrer alors que son visage d'enfant se voit déformé par un rire empreint de sadisme et d'amusement, ses yeux pétillant sous la représentation morbide de la noyade de Narcisse. Il doit souffrir, il doit payer pour la provocation qu'il avait mit en place et pour la certitude qu'il avait d'être accepté par Nessie parce qu'il était doté d'une beauté sans pareille. Le voici prisonnier de son courroux pendant deux longues minutes. Uniquement deux minutes, cent-vingt secondes rien de plus. La reine des eaux sait pourtant parfaitement que ceci peut paraître une éternité dans un corps torturé. Pourquoi ne pas faire durer la chose ? Pourquoi ne pas en profiter d'avantage ? Nessie est encore une enfant et lorsque les enfants obtiennent le jouet qu'ils désiraient ardemment depuis longtemps, ils s'en lassent à l'instant même où ils le tiennent dans leurs petites mains. Narcisse a souffert de son courroux mais, étant déjà décédé, elle aurait pu le garder éternellement prisonnier sans que jamais il ne meurt. Et Nessie ne s'en satisfait-elle pas ? Non. Pas aujourd'hui. Heureusement pour le jeune humain, Nessie se trouve dans un jour où pas grand-chose n'arrive réellement à la mettre en colère, si ce n'est son père bien évidemment. Aussi entre-t-elle dans la fureur aussi rapidement qu'elle en sort. En ce jour, le léviathan est fatigué. Lassé des enfers et de son état, elle entre dans une sorte de légère apathie. Ainsi, voici ce qui permit à Narcisse de tomber dans l'eau du lac, enfin libéré de la prison acqueuse. Un soupir passa ses lèvres tandis qu'elle le regardait de haut, restant debout sur la surface de l'eau. -Tu me fatigues Narcisse. Va-t-en d'ici et laisse-moi dans mon agressivité stérile.Elle prononça les derniers mots avec une pointe de moquerie avant de tourner les talons, marchant sur la surface du lac pour se diriger vers un énorme rocher gris sur lequel elle s'installa. Serrant ses jambes contre son buste, elle déposa son menton au creux de ses genoux, perdant à nouveau ses yeux dans la contemplation de son lac. La bête des cauchemars des marins semble sombrer lentement dans l'ennui et la fatigue de ces siècles en enfers. |
| | | Narcisse E. Céphise Messages : 280 Points : 5277 Date d'inscription : 03/05/2014
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Dim 13 Juil - 18:41 | |
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L'Orgueil, poussé à ses extrêmes, possède un indéniable défaut : il détourne d'autrui l'attention de l'Orgueilleux qui pense n'avoir besoin que de lui-même. Pourquoi s'intéresser aux autres, quand on se suffit à soi-même ? Souvent, être centré sur soi aide l'orgueilleux à vivre et lui évite bien des désagréments. Mais parfois, cette caractéristique peut se retourner facilement contre lui. Surplus d'orgueil diminue l'attention portée aux autres, et peut nous faire oublier de nous en méfier...
C'est ce qui advint à Narcisse, qui s'était relevé pour faire face au Leviathan toujours dressé au milieu du lac, dans un très frêle équilibre entre eau et ciel. Tout à son discours et à sa belle éloquence, le gourou des Orgueilleux cessa de faire attention à son interlocutrice. S'il avait vu sa colère enfler, ses poings se serrer, son visage se tordre en un rictus frustré, alors peut être aurait-il pu reculer. Fuir pendant qu'il en était encore temps. Accepter une provisoire défaite, pour échapper à quelque chose de bien pire encore. Mais il ne vit pas la fureur grandissante de Nessie. Il l'ignora comme de coutume. Et cet orgueil, cet ignorance de la souffrance des autres, le perdit enfin. Une fois de plus.
Ce n'est qu'à la fin de son discours qu'il releva la tête, contemplant le visage de Nessie, notant au passage et pour la première fois depuis son arrivée la nudité de l'enfant, vision dûe à la persistance de cet inutile pouvoir. Mais il n'y pensa même pas. Car, de derrière le voile de l'orgueil qui lui brouillait la vue, il perçut l'éclair de fureur qui traversa le regard de celle à qui il avait adressé ces mots. Alors, il dût l'avouer, une onde d'effroi le parcourut soudainement, lui donnant soudainement la chair de poule. Il eut le temps de le sentir. Mais pas de réagir.
Il n'entrevit même pas le geste de Nessie. Il ne vit pas l'Eau. Mais il la sentit. Froide, visqueuse, compacte, envahissante. En un clin d'oeil, elle fut sur lui, l'emprisonnant de sorte qu'il ne put plus remuer. Narcisse essaya de reculer, mais le moindre geste était impossible. Son visage était maintenu hors de l'eau... pour le moment. Il la voyait remuer autour de lui, craignant son irruption, sa présence, son invasion. Il se sentit confusément soulevé de terre dans sa bulle aqueuse. De crainte, il se figea et ferma brièvement les yeux. Quand il les rouvrit, Elle était là. L'eau, bien sûr, mais aussi Nessie. Elle le dévisageait, les yeux froncés, les yeux flamboyant de colère. C'était à elle de parler.
-Les gens superficiels n'ont pas leur place ici Narcisse. Tu entres chez moi sans me demander quoi que ce soit et maintenant tu te mets à parler de papa de façon détournée. Tous, connaissent ma fureur et pourtant, l'amoureux des miroirs ose me titiller. Grosse bêtise et les enfants pas sages, on les puni.
"De Papa" ? Narcisse, tout à sa personne, n'avait jamais pris la peine de se renseigner sur l'histoire de Nessie. Il en avait bien entendu quelques bribes, mais pourtant... elle était là, et ça lui suffisait. Il avait jusque là apprécié leur jeu silencieux. Mais cela commençait curieusement à se corser. Il aurait du en apprendre plus sur elle, finalement. Ces connaissances lui faisaient maintenant cruellement défaut. En effet, il n'avait mis aucune allusion à l'histoire de Nessie dans son envolée lyrique... Il eut juste le temps d'articuler d'une voix déformée par la peur :
- Mais Nessie, je n'ai pas...
Qu'il ne put plus placer un mot de plus. Sa bouche se remplit brusquement de cette eau, qui venait d'attendre son visage. Narcisse buvait la tasse. Par réflexe, et peut être aussi par méconnaissance du contact d'une eau qu'il avait oublié en toutes ces années passées à tenter de l'eclipser de sa mémoire, il cria, formant un son déformé qui sembla s'étirer autour de lui. Après le cri, il prit une grande inspiration, laissant encore une grande lampée d'eau pénétrer dans ses poumons.
L'eau glaciale lui semblait brûlante.
Il avait fermé les yeux, de peur, de surprise, mais aussi par réflexe face à l'agression de la substance aqueuse qui semblait pénétrer chaque pore de sa peau. Il rouvrit les paupières dans un mouvement de panique mais ne put rien discerner dans l'eau translucide ; il lui semblait que tout tournoyait autour de lui. Et cette sensation, dans sa poitrine... Il suffoquait dans un étouffement qui provoquait chez lui une vague de spasmes mortels.
Il n'aurait jamais pensé revivre pareille torture. Il avait craint le retour d'un tel moment de toute son âme damnée, du plus profond de son inconscient torturé par les derniers moments atroces qu'il avait passés sur Terre. Et voilà que tout cela recommençait.
Une vague d'impressions, de sensations et de pensées traversait l'Orgueilleux qui en venait à oublier son Orgueil et à souhaiter la mort, délivrance qui signifierait l'arrêt de ses souffrances. Dans un tel moment, même le damné le plus aguerri oublierait qu'il ne peut pas mourir une deuxième fois.
L'Enfer n'était pas l'Enfer. L'Enfer, c'était ça. Ce moment, à revivre à l'infini. A l'infini... Non. Impossible. Si son bourreau avait vécu une seule seconde de ce moment, elle éprouverait de la compassion pour ce qu'il endurait et mettrait fin à cette torture. Mais le courroux du Léviathan est sourd à la pitié. Narcisse pensait à ce supplice s'éternisant, lui paraissant durer des heures, des jours, des mois, des années. Il perdit toute notion du temps. Pleurait-il ? Le pouvait-il, étant déjà submergés par les flots ? Cela allait-il un jour finir ?
D'un seul coup, il sentit la terre - ou plutôt l'eau - se dérober sous ses pas et l'air lui gifla le visage sans qu'il put encore respirer. Mais rapidement, il se sentit à nouveau submergé dans une masse aqueuse qu'il devinait encore plus grande. Tout s'était remis à tournoyer autour de lui. Il n'y comprenait goutte. Sans mauvais jeu de mot, bien sûr... Et d'un seul coup, il sentit l'air passer entre ses lèvres. Il était revenu à la surface. Il se mit à tousser, expulsant une partie de l'eau de ses poumons, eau qui lui revenait sans cesse, à chaque fois que le personnage se retrouvait à nouveau immergé. Narcisse perdait pied. Il ne savait pas nager. Tout en s'abaissant à coup de grands mouvements canins exécutés dans un effort vain pour rester à la surface, il perçut quelques mots de la phrase méprisante que lui adressa Nessie.
-Tu me fatigues Narcisse. Va-t-en d'ici et laisse-moi dans mon agressivité stérile.
"Va-t-en." Comment le pouvait-il ? Il était encore prisonnier de la surface des eaux, le visage ruisselant d'eau boueuse mêlée à des larmes d'humiliation et de douleur. Entre deux soubresauts où il arrivait maladroitement à émerger, il balbutia :
- Si tu veux... que... je parte...
Quel déshoneur. Narcisse acheva d'écraser son amour propre qui gisait déjà six pieds sous la surface :
- Alors aide-moi.
Il était évident que Narcisse, après son aventure, ne saurait pas nager. Pourtant, il aurait du apprendre. Il aurait pu ainsi sauver le peu d'honneur qui lui restait.
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Mer 30 Juil - 13:57 | |
Tell me would you kill, to prove you're right… Logée sur son rocher tel une sirène échouée, la bête de la colère ancra son regard sur la surface de l'eau agitée, bien trop agitée. Quelle en est la cause ? Narcisse, à nouveau, cet humain ridicule et inutile qui ne sait que troubler sa quiétude, ou du moins son semblant d'apaisement qu'elle cherche désespérément à obtenir. Il éclabousse la surface de l'eau, se tortille et se secoue en tous sens. Pourquoi fait-il tant de simagrées ? L'un de ses sourcils s'arque, de l'aide ? Pourquoi dem…Un soupire passe le barrage de ses lèvres rosées. C'est une évidence voyons, si Narcisse s'est noyé la première fois c'est tout simplement parce qu'il ne sait pas nager et cet imbécile orgueilleux n'a pas jugé utile de combler cette lacune qui lui coûta la vie par le passé. Ses iris d'azure roulent dans ses orbites, que faire dans ce cas ? L'aider ? Pourquoi le devrait-elle ? Après tout le Léviathan ne sort pas les hommes des eaux mortelles, il les y attire et les noie avec une passion macabre. Il se repait de la terreur qui déforme leurs traits avant que le baiser de la mort ne leur soit offert en guise d'abréviation de souffrance. Il s'amuse au détriment de leur terreur et dévore leur cœur. Alors, en cet instant, au nom de quoi devrait-elle changer la nature même de son être en aidant ce misérable cloporte narcissique ? Parce qu'elle est enfermée dans ce corps de petite fille ? Parce qu'elle n'est plus ce qu'elle fut jadis et que venir en aide à Narcisse serait un pas vers l'acceptation de sa nouvelle existence ? Balivernes. Profondément agacée, la voici se levant de son rocher, marchant à la surface de l'eau tout en se rapprochant du pauvre homme, englué dans sa propre terreur des eaux qui l'aspirent un peu plus à chaque seconde. L'enfant, nullement stressée devant pourtant l'urgence de la situation, s'assied sur la surface du lac, à quelques centimètres du jeune homme toujours en train de se débattre. Elle le toise de ses yeux cernés par toutes ces années de colère et de frustration, elle essaie de comprendre, de le comprendre d'une certaine manière. Une fois sa colère calmée, ses paroles lui reviennent en mémoire, tel un murmure de vérité : "Qu'est-ce qui te pousse, Nessie, à chercher au fond de ces marais, la négation de ton humanité même ?" Elle se mord la lèvre inférieure, pensive, alors que le pauvre bougre continue de se battre pour son éternité en enfers. Son humanité même…Mais quelle humanité ? Elle ne l'a jamais été. N'est-elle pas le serpent de Lucifer ? N'est-elle pas l'anguille de tous les cauchemars ? Alors où se cache son humanité ? Dans cette apparence chétive ? Mais elle n'est que factice, cette enveloppe charnelle. Sont-ce ses émotions dans ce cas ? L'enfant cogite, encore et encore mais elle ne parvient à trouver aucune réponse. Délicatement, sa main droite se lève pour venir se déposer avec volupté sur le front de Narcisse. Subitement, l'eau se figea durant un quart de seconde avant de se retirer complètement du corps du jeune homme, le soulevant par la suite avec douceur pour le mettre assis en tailleur à côté de la reine du styx. Nessie glissa ensuite une main dans sa chevelure rosée, ses yeux se levant vers ce qui faisait office de ciel en enfers, se penchant légèrement en arrière pour prendre appuie sur ses mains. Une légère brise vint alors s'amuser avec ses cheveux tandis qu'elle demanda d'un air pensif et lointain : "- Narcisse dis…c'est quoi l'humanité ?"A cet instant précis, elle avait tout d'une enfant d'à peine douze ans. Sa voix ne comportait ni haine, ni colère, ni frustration, elle n'était qu'une enfant qui cherche une réponse à une question qui la tourmente, une question dont elle-même peine quelque peu à en comprendre le sens. Cela fait tant d'années qu'elle réfute sa forme humaine mais au final sait-elle réellement ce contre quoi elle se bat ? Connaît-elle vraiment la nature de la chose qu'elle repousse avec véhémence ? Une pointe de nervosité et d'appréhension envahissent son cœur et la petite fille, se redresse alors en position assise, serrant ses genoux contre sa maigre poitrine, arborant un visage rempli de curiosité et d'attente et ancra un regard noyé d'incompréhension sur le visage du beau jeune homme. Qu'est-ce que l'humanité ? Qu'est-ce qui fait d'un homme, un homme ? Quels sont les critères ? Les conditions ? N'est-ce qu'une question de corps ? D'apparence ? Ou est-ce quelque chose de plus mystique, quelque chose que l'on ne peut ni toucher ni voir ? Ces questions se bousculent dans son esprit alors qu'elle toise Narcisse de ses grands yeux d'enfant. Quand elle saura, peut-être pourra-t-elle ainsi mieux se battre contre ça ? A moins bien sûr, que la réponse qu'elle attend, ne créé une dérangeante remise en question pour le monstre des océans ? |
| | | Narcisse E. Céphise Messages : 280 Points : 5277 Date d'inscription : 03/05/2014
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| Sujet: Re: Jeu silencieux, jeu dangereux [Nessie Galloway] - Abandonné Sam 2 Aoû - 21:05 | |
Jeu silencieux
jeu dangereux
La diabolique petite fille ne semblait pas décidée à mettre fin au supplice de Narcisse, qui se débattait toujours dans les eaux sombres, s'y enfonçant parfois jusqu'à ne plus pouvoir respirer, pour remonter ensuite dans un soubre-saut, et ensuite succomber à nouveau. Tout à la souffrance de l'eau pénétrant par vagues successives dans sa gorge et dans ses poumons, Narcisse ne regardait pas son bourreau, qui de lac furieux était redevenu chétive enfant. Il ne vit donc pas qu'elle avait quitté sa posture menaçante pour prendre un air songeur. Un air de petite fille qui réfléchit, mais ne renvoit aucun reflet à l'orgueilleux. L'attention de Narcisse n'était jamais vraiment tournée vers autrui. En cet instant, elle n'était tournée que vers lui-même. Mais il ne s'agissait pas là de contempler sa propre splendeur, mais de ressentir sa propre douleur. Ce genre d'occasions étaient rares. Narcisse était trop bien protégé, dans sa cage dorée du quartier Six. Il possédait une foule de fidèles et une garde rapprochée. Cela suffisait à sa sécurité. Et pourtant, il allait régulièrement s'exposer aux dangers de l'extérieur en cherchant la solitude. En effet, comment un orgueilleux tel que lui pouvait-il supporter longtemps la présence de ses semblables ? Narcisse n'était pas mysanthrope. Il appréciait ses semblables... du moins, ceux qui l'admiraient et qui le flattaient. Il avait besoin d'eux pour vivre. Il vivait dans l'attente anxieuse de la reconnaissance d'autrui, tout en n'aimant que lui-même. Quel paradoxe... et pourtant, il fallait faire avec. C'était sa nature, et on a beau clamer que "l'existence précède l'essence", Narcisse, lui aussi, avait quelque chose de non-humain - de sur-humain, dirait-il, mais rien n'était moins sûr -. Il n'avait pas vraiment la liberté des hommes. Il était soumis à lui-même. Et il n'était apparemment pas le seul.
Soudainement, Narcisse sentit le contact doux d'une peau tiède et étonnament sèche. La main de Nessie s'était posée sur son front blême, comme celle d'un médecin auscultant son patient. Lequel était le plus en mesure de livrer à l'autre un diagnostique ? Leurs deux natures inhumaines pouvaient-elles se comprendre, où étaient-t-elles condamnées à se heurter ? Narcisse se sentit soulevé de la surface de l'eau.
L'étouffement cessa, et une quinte de toux le prit pendant que de grosses gouttes ruisselaient encore sur son corps, alors que ses cheveux pendaient en misérables mèches humides collées à sa peau. Quel état pitoyable. Il valait mieux éviter qu'on le voie ainsi. Nessie ? Elle, ce n'était pas pareille. Après tout, elle était responsable de la situation présente. D'ailleurs, que se passait-il ? Qu'est ce qui la poussait à mettre fin à un supplice dont elle devait pourtant se délecter ?
Sans comprendre, Narcisse se retrouva assis en tailleur à côté de la petite fille. Elle était effrayante dans le calme de ses traits. Le calme après la tempête. Et avant l'ouragan. Il fallait l'admettre : elle était imprévisible. Et malgré l'apaisement de la situation, rien n'était encore gagné. Nessie semblait plongée dans une longue réfléxion. Peut être pensait-elle avec délectation à ce qu'elle allait lui faire ensuite. Aucune chance de s'échapper pour le moment : dans sa douceur retrouvée, elle ne le maintenait pas moins prisonnier au milieu des eaux. La respiration de Narcisse était rapide et rauque ; ses yeux étaient rougis par le contact de l'eau. Il regardait autour de lui d'un air hagard, semblant encore épouvanté par l'étendue de la surface d'eau qui l'entourait. Quel contraste entre elle et lui ! Et quelle inversion des rôles : c'était à présent elle qui était calme. D'un calme d'enfant fatiguée. De petites cernes barraient son visage usé par le temps et par la haine. Et soudainement, elle posa d'une voix tirant vers les aigus une question qui stupéfia son orgueilleux interlocuteur.
"- Narcisse dis…c'est quoi l'humanité ?"
L'humanité. Lui poser cette question, à lui, immortel éphèbe condamné à contempler la frontière toujours plus infranchissable qui le séparait de lui-même...
Narcisse, après son bain forcé, restait narcissique. Mais il était assez assommé par sa noyade pour ne plus penser à forcer le trait. Que répondre, à cette question d'enfant ?
- C'est peut être ce que j'ai moi-même perdu, commença-t-il sans parvenir à continuer.
Il avait parlé d'un ton las et résigné. En plusieurs siècles, il avait eu assez l'occasion de réfléchir sur sa condition. Ceci ne l'émouvait guère plus. Narcisse était à présent comme immortel ; mais son esprit semblait s’éroder. Il commençait à ne plus s'étonner de rien, même en lui-même : la "vie" devenait bien fade.
- Mais je l'ai perdue pour arriver à quelque chose de supérieur, reprit-il, autant pour lui-même que pour son interlocutrice, à qui il déclara : Tout comme toi. Ne pas être humain, c'est souvent être plus. Car il est difficile de tomber plus bas.
Et pourtant, il lui avait auparavant parlé d'humanité. C'est que, quand Nessie s'énervait, elle semblait descendre à une inquiétante "sous-humanité". Mais il valait mieux garder cette pensée pour soi. Veiller à ne pas l'énerver à nouveau. Difficile...
RP inachevé pour cause de désinscription de Nessie
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